Grâce à d'incessantes recherches, la plupart des manuscrits encore existants de ménétriers du 18 ème et 19 ème siècle ont été retirés de l'oubli et sont maintenant disponibles en fascicules reliés au prix coûtant (prix des photocopies). Nous allons présenter tout au long de ces pages une série de pièces caractéristiques de l'époque, représentant la quintessence du contenu de ces documents.
La plupart de ces pièces ont été écrites pour le violon, ainsi que pour des instruments à vent.
La parenté entre les divers manuscrits présentés ici vient de la présence de pièces communes, notées à l'identique comme la Belle liégeoise ou avec des modifications notoires de rythme et de tonalité. Houssa réalise la couverture de son carnet avec des feuilles portant entr'autre un menuet également présent dans le Wandembrile et le Charles. Notons aussi des pièces à succès qui passent au travers des modes. La vieille matelotte se retrouve dans le Houssa, le Wandembrile, le Feuillet et est chantée déjà dans l' opéra Alcione de Marin Marais cela sous le titre d'air des matelots.
La difficulté technique des pièces est très variable. Certaines contredanses sont très pauvres, d'autres demandent une réelle dextérité voire virtuosité. L'on peut remarquer que les pièces qui suivent la mode et sont, peut-on dire, consommées fraîches au bal du samedi, ne sont pas de première valeur. Par contre, le répertoire que se constitue un ménétrier, tel Jamin , est adapté à son jeu , est homogène dans son contenu technique et expressif. Notons la parenté certaine des valses de Jamin avec des landlers de Haydn et Mozart. Les contredanses de Delhaise sont le fait d'un musicien confirmé, manipulant harmonie et contrepoint. Cette difficulté ne doit pas nous étonner. La pratique d'un instrument rencontrait une fonction sociale, faisait partie de la vie . De plus l'apprentissage se faisait presque par imprégnation tant pour le répertoire que pour la manière de jouer. Nous étions loin de l'à-peu-près et du un-peu-de-tout de maintenant. La présence dans tous ces manuscrits de marches lentes, quelquefois en nombre important, interpelle. Elles sont très homogènes quant au rythme et à l'effet donné. Cependant, aucune précision d'utilisation en danse ou autres circonstances n'est donnée. Même pas dans Houssa qui pourtant n'est pas avare de précisions à cet égard.
Comment interpréter ces pièces? Il faut garder à l'esprit qu'elles sont destinées à la danse et que la contredanse est toujours figurative contrairement aux danses par couple. La présence des danseurs impose un mouvement en rapport avec les déplacements. Il est heureux de suggérer une tension aidant à la dynamique des danseurs. N'oublions pas d'interpeller avec grâce afin d'éviter monotonie et lassitude. L'instrumentarium succite pas mal de commentaires et critiques parfois acerbes. Il est des associations qui font que cela " tombe dedans " tout naturellement. Mais nous entrons là dans les goûts et les couleurs . Chacun y va de son mot et avis personnels. L'on joue Bach au piano, Jamin au diatonique. Affaire de goût. L'important étant sans doute de le faire avec bon goût.
Ces documents sont surtout importants pour les renseignements historiques qu'ils apportent.